Ni gourou, ni surhomme, simplement vrai (1)

J’ai été étonné de l’intérêt suscité par mon dernier billet sur l’exemplarité intitulé d’une manière un brin provocatrice : « L’escalier se balaie par le haut ! ».

Mille mercis à tous ceux qui ont trouvé un intérêt à cette lecture. J’ai eu envie de reprendre vos contributions pour pousser un peu plus loin la réflexion tellement celles-ci étaient pertinentes.

Le titre est d’ailleurs emprunté à Juan-Antonio, syndicaliste CFDT, qui a tout à fait raison d’insister sur ce point essentiel, pour être exemplaire, on ne cherche pas la perfection ou l’infaillibilité, il y aurait simplement une quête de vérité avec soi.

Frédéric nous dit que l’exemplarité sans l’authenticité est un non-sens et Sylvie nous rappelle qu’elle reste la base d’une relation de confiance durable quand ce n’est pas tout simplement la clé d’une saine gestion d’équipe comme le dit aussi Caroline confrontée à un dirigeant étranger qui découvrait le mot en français !

Dominique exprime que ce sujet reste à vif alors que l’exemplarité devrait être une attitude naturelle et partagée par tous ceux qui sont en situation d’influence sur d’autres personnes.

Ce n’est bien sûr pas évident et trop de contre-exemples émaillent encore la vie du management pour ne parler que de l’entreprise. Si Alain est pleinement d’accord avec cette quête d’exemplarité, il serait peut-être moins exigeant tout en critiquant la consanguinité et les arrangements entre amis.

Hervé s’est interrogé sur la faiblesse des progrès constatés chez les dirigeants voire également au sein des conseils d’administration après tant de séminaires, d’ouvrages, d’articles, de débats ou de conférences organisées sur le leadership ou le management. La dimension humaine reste sans doute la grande absente des réflexions chez les administrateurs.

Oui, Dominique, cela demande de sacrés efforts, je peux témoigner de la vigilance régulière que cela impose et que l’on n’est pas toujours au top de ce que l’on devrait être.

Peu importe le nombre de marches, selon François, dans une structure bureaucratique importante on peut trouver des instances dirigeantes hors sol, bien loin des réalités opérationnelles quotidiennes.

Ce qui fait dire à Gary Hamel dans un récent interview aux Echos que faire évoluer l’architecture de nos entreprises bureaucratiques et leur idéologie suppose des leaders reconnus par leurs pairs, travaillant à conserver leur influence chaque jour grâce à leurs contributions mais surtout comprenant que leur autorité future ne sera plus liée à leur position hiérarchique mais à leur capacité à mobiliser et faire consensus.

Il va même jusqu'à se poser la question, a-t-on encore besoin de managers ?

Personnellement je pense que oui mais à voir certaines attitudes on ne regrettera pas ceux qui s’enferment encore dans des comportements toxiques gelant performance ou créativité et empêchant les talents individuels de se révéler.

Ludovic s’exprime cash à ce sujet en rappelant que des têtes pourries continuent à mordre et Michael n’hésite pas à dire qu’il y a des endroits qui mériteraient un coup de propre…

Quand je me suis lancé dans « la gestion du personnel » dans les années 70, il n’y avait pas encore de programme universitaire dédié RH mais j’ai été marqué durablement par les recherches de grands psychologues humanistes comme Carl Rogers qui dès 1940 avait théorisé l’importance de l’écoute et de la présence à l’autre.

Il rappelait que seul celui qui se comprend peut réaliser tout son potentiel, il faut alors un certain courage pour oser aller au-delà de ses peurs, accepter de ne pas être parfait, de ne pas être aimé.

L’humanisme commence par se revisiter soi-même, ce que note Laurence, connaissance de soi, de ses valeurs et de sa mission.

Va regarder à l’intérieur de toi nous disaient déjà Héraclite ou Socrate.

Est-ce qu’entreprendre ne signifie pas prendre sa vie en mains !

Soyez vous-même, les autres sont déjà pris, notait avec humour Oscar Wilde.

Alors raisonnons différemment, l’entreprise est finalement avant tout une communauté humaine : pas d’actionnaires, pas de collaborateurs, pas de salariés, pas de clients mais tout simplement des êtres humains. Apparaît alors un autre angle de vue, une notion de parité et de respect à cultiver pour éclairer les rapports entre toutes les parties prenantes.

J’ai bien aimé la remarque de Didier transformant la citation biblique dans une forme positive pour une belle exemplarité : « tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, alors vous aussi vous devez le faire pour eux ».

J’ai encore le souvenir très présent de mes tâtonnements chez PPR pour trouver le bon réglage dans le positionnement et le comportement en tant que DRH afin de caler impact et influence pour une collaboration progressive et humble au service de la stratégie du Groupe.

Que de doutes et d’insomnies avant d’émerger au fil des années…

Guy a écrit qu’il y avait deux exemplarités à combiner, l’exemplarité morale pour le vivre ensemble et l’exemplarité stratégique pour la dynamique de l’organisation, là encore c’est très juste.

Il faut se méfier des recettes de management qui sonnent faux et qui ne correspondent pas aux attentes. Il n’y a pas de modèle, juste ce que l’on est capable d’entreprendre en équipe à un moment donné avec les ressources disponibles, l’enthousiasme et l’énergie des hommes dans un écosystème donné.
Nicolas a insisté sur le fait que l’exemplarité n’est utile que si elle est contextualisée avec beaucoup de sens.

Le groupe PPR était déjà réputé pour l’excellence de sa stratégie, nous avions imaginé par exemple avec Serge Weinberg un corpus de six attitudes pour guider les managers dont les deux premières étaient « parler vrai » et « voir vrai », celles-ci auront marqué les leaders et managers de l’époque et ont certainement été à l’origine d’une forte culture de Groupe ou l’exemplarité avait toute sa place.

C’est Etienne qui rappelle que la primauté des valeurs suppose par exemple de ne pas recruter un candidat compétent qui ne serait pas aligné sur l’attitude souhaitée par l’entreprise. Qui le fait vraiment ?

Je crois que cette recherche d’authenticité et de vérité devrait constituer une démarche essentielle et incontournable pour tout dirigeant ou manager déterminé à cultiver son exemplarité. Il faut juste le vouloir, y consacrer du temps (long) et être prêt à agir pour bousculer ses habitudes.

Virginie insiste ainsi sur la nécessité éthique et comportementale qui devrait faire partie des basiques pour tout leader.

Comme Philippe qui regrette que l’éducation sur ces vertus de l’exemple est trop absente des grandes écoles et qui cite son père ancien DRH d’une grande entreprise marqué par l’exemplarité de ses dirigeants donnant les bons repères pour situer ce qui est acceptable ou non, créant les conditions de l’indispensable respect pour être suivi quel que soit le climat ambiant.

Je laisse les magnifiques mots de Catherine conclure :

« Se sentir responsable de donner l’exemple, faire de son mieux chaque jour, donner du sens, cœur vaillant à l’épreuve des illusions et de l’usure du temps »

(1) Suite de l’article L’escalier se balaie par le haut !

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